Vers un Twitter à 3 vitesses sous fond d’impossible discernement des vraies informations

La méthode d’Elon Musk par essais/erreurs et itérations successives avec les utilisateurs est une fois de plus mise à l’épreuve. Sous couvert d’éliminer les bots et les spams avec une formule Not A Bot, l’actionnaire de Twitter désormais X veut rendre payant symboliquement le réseau social. Tout comme Amazon qui, lors d’une nouveauté dans l’interface de son site e-commerce, va la tester d’abord dans quelques États des États-Unis avant éventuellement d’opérer un lancement global ou de faire marche arrière le cas échéant, il en va de même pour Twitter. Le réseau social depuis son rachat voici 1 an s’est bien transformé. Et l’alternative (de type Bluesky, Threads ou encore Mastodon côté open source) ne perce pas encore.

Vers un Twitter payant à 3 vitesses

Pour autant, la difficulté de positionnement de Twitter en Europe est réelle d’autant plus que le projet de loi visant à sécuriser et à réguler l’espace numérique vient d’être adopté. Celui-ci amène des avancées notamment pour lutter contre la pornographie en ligne et mieux protéger les mineurs ou encore pour lutter contre le cyberharcèlement et les cyberarnaques. Pour autant, cette loi fourre-tout est potentiellement liberticide avec censure de contenu n’entrant pas dans la « doxa officielle » et sanctions pour les plateformes en apportant « des protections nouvelles contre la désinformation ». La vérité officielle n’est en effet pas absolue mais relative. Elle peut-être par ailleurs évolutive dans le temps. Dans ce contexte, Twitter reste l’outil d’information en continu le plus pertinent disponible à condition de faire preuve de discernement et savoir faire le tri rendu en outre plus difficile avec les deepfakes produites par les IA génératives (DALL-E et Midjourney par exemple pour les photos créées) et les défauts des algorithmes des réseaux sociaux mettant en avant des contenus clivant et suscitant des émotions poussant à la viralité, les contenus consensuels et neutres jugés plus fades par les internautes étant l’objet de moins de buzz et d’effet boule de neige. Il est évident que nous avons des fake news mais celles-ci ne proviennent pas que des extrêmes comme on l’a vu avec des informations officielles erronées comme par exemple s’agissant du Covid19 et du vaccin qui empêchait la transmission ou qui était dépourvu d’effets secondaires. Ainsi voici peu nous avons d’un côté Elon Musk qui menace de se retirer du marché européen, de l’autre le commissaire européen Thierry Breton qui fait planer de fortes amendes sur la plateforme sachant que dans la vraie vie il est déjà impossible de mettre un gendarme derrière chaque citoyen. Comment pourrait-il en être autrement sur Internet avec la profusion d’informations produites ? Voulons-nous prendre le risque de subrepticement glisser vers un système de cybersurveillance à la chinoise ?

En ce qui concerne le paiement du réseau social, notons que WhatsApp avant son rachat en octobre 2014 par Facebook était gratuit la première année avant de demander 99 centimes par an à ses utilisateurs, une fois habitués. C’est un peu ce que Twitter va faire. A titre d’expérimentation – mais avec certainement une généralisation dans le monde qui suivra – pour la Nouvelle-Zélande, l’autre pays du rugby, et les Philippines, Twitter (pardon X) est devenu payant le 18 octobre pour les nouveaux utilisateurs qui veulent publier du contenu et interagir avec d’autres posts.

Ceci constitue une première étape vers l’abonnement généralisé. Déjà les badges vérifiés pour des VIP ont été troqués par des badges certifiés pour tous à condition de payer un abonnement annuel ou mensuel. Le prix est de 1 dollar par an – mais il pourrait évoluer. Certains pourraient dire que c’est payer pour compenser les erreurs stratégiques de l’actionnaire qui a fait fuir de gros annonceurs. Ce prix symbolique est également l’opportunité pour X de récupérer les coordonnées bancaires des abonnés.

Une autre possibilité aurait été de modérer les contenus, ce qui a un gros coût humain et algorithmique mais n’est aucunement fiable à 100 % et on l’a vu précédemment fake news et vérité sont clivantes. Il vaudrait mieux parler d’information à caractère de vraisemblance de 0 à 100 %. Par exemple, « la terre est plate = 0 % de vraisemblance ».

Pour récapituler l’évolution des formules de X, nous allons tendre vers 3 catégories d’utilisateurs de la plateforme :

Les trois formules de Twitter du gratuit au premium

En tout état de cause, on converge de plus en plus vers un tweet censitaire. Payer pour publier, payer davantage pour augmenter sa probabilité d’être vu et lu sachant que d’autres paramètres interviennent fort heureusement comme le choix des mots, la valeur informationnelle, le moment où l’information est publiée et sa résonance avec l’actualité du moment, les éléments multimédias joints, etc. même si les liens extérieurs sont pénalisés. Tous les chemins sont faits pour mener ou plutôt rester sur la plateforme X.

1 Commentaire

  1. Merci pour cette analyse, David.

    La question que je ne peux pas m’empêcher de me poser est : pourquoi créer de la valeur pour le compte d’Elon Musk, celui de Jay Graber et Jack Dorsey (Bluesky) ou d’autres ?

    L’avènement d’un réseau social sous la forme d’une coopérative, dans laquelle chaque utilisateur serait sociétaire moyennant l’achat d’une ou plusieurs parts sociales, permettrait à l’ensemble des membres de bénéficier à leur propre compte de l’effet réseau, qui veut que la valeur d’un réseau est proportionnelle au carré du nombre de ses nœuds.

    Les revenus publicitaires générés par la coop seraient réinvestis dans cette dernière ou reversés sous forme de dividendes aux utilisateurs-sociétaires.

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