3 questions à … Mathilde Bohrmann

Interview de Mathilde Bohrmann

1. Pourriez-vous nous présenter l’apport des CMS dans le développement des sites Web ? En quoi constituent-ils une aide précieuse aux PME ?

Les CMS (Content Management System) sont des logiciels de gestion de contenu. Les CMS ont démocratisé la gestion d’un site web. Surtout les CMS hébergés qui libèrent alors totalement l’utilisateur de toutes contraintes techniques liées à la gestion d’un site. Pas besoin de connaître le HTML ou de savoir ce qu’est un serveur FTP. Une fois le site mis en place, le patron de PME peut administrer son site tout seul. Il peut se concentrer sur l’essentiel, le contenu, c’est-à-dire la mise en ligne d’information sur son site. Actualités de la société, nouveaux produits, etc. Le contenu est ce qu’il y a de plus important pour un site. Les internautes ne reviennent pas sur les sites statiques et les moteurs indexent moins bien les sites peu mis à jour. Les plates-formes de blogs sont des CMS. Le fait que les blogs soient mis à jour très régulièrement (parfois plusieurs fois par jour) expliquent leur succès à la fois côté lecteurs et côté moteurs.

Deuxième aspect très important : le fait que le code soit dissocié du design et du contenu. D’un point de vue pratique cela signifie que l’utilisateur peut changer la charte graphique de son site en gardant le même contenu. Un de nos clients a par exemple un thème graphique été et un thème graphique hiver qu’il met en ligne d’un simple clic. D’autre part, cette séparation du code (on parle de code sémantique) facilite le travail d’indexation des moteurs. On parle alors de plate-forme optimisée pour le référencement. Le contenu est bien indexé et on ressort mieux sur les moteurs de recherche. A noter que tous les CMS ne sont pas égaux au niveau de la qualité de leur code 😉

2. Comment jugez-vous le développement des PME françaises actuellement sur Internet ? Qu’est-ce que le Gouvernement pourrait faire pour inciter à leur développement sur Internet ?

Avant de râler il faut souligner que les infrastructures (réseau internet et 3G) sont de très bon niveau en France par rapport à la plupart des autres pays. Là où le bât blesse c’est sur le reste, à savoir sur l’information des entreprises. Les hommes politiques connaissent la politique mais pas Internet. Comme les patrons de PME, ils utilisent le web, ont entendu parler de blogs et de réseaux sociaux, des logiciels libres et du référencement, mais ils ne savent pas comment cela fonctionne vraiment. Du coup ils ont tendance à se ridiculiser quand ils parlent technique. On peut citer en exemple la boulette de Christine Albanel qui a bien faire rire la blogosphère geek cette semaine.

Les outils disponibles sont assez risibles parce qu’initiés par des politiques qui n’ont pas fait appel aux bonnes personnes pour les mettre en place : Par exemple le « passeport numérique« , annuaires de solutions TIC dédiées aux TPE. En surfant sur le site du passeport numérique, on peut découvrir dans leur guide d’achat des conseils pour choisir un ordinateur. Complètement inutile, surtout si ce n’est pas daté car les configurations évoluent. « Dans tous les cas, assurez vous de la présence d’un système d’exploitation adapté aux besoins professionnels, c’est-à-dire avec une gestion avancée des fonctions de mise en réseau (gestion de domaines, groupes de travail, gestion des droits) et un bon support. En la matière, le fameux Windows XP Professionnel, mais aussi les Linux et Mac OS X répondent parfaitement aux exigences professionnelles.  » Conseiller une configuration n’est pas le rôle du gouvernement, d’autant plus que le gouvernement n’a pas une grande crédibilité quand il nous parle d’Internet. Le rôle du gouvernement serait d’informer, d’éduquer et de permettre à la population d’acquérir un minimum de culture numérique. Nos clients, même jeunes, ne savent pas ce qu’est un fil RSS ou un nom de domaine. Il y a des ateliers d’initiative privée comme ceux de Silicon sentier qui permettent vraiment d’échanger entre utilisateurs et spécialistes. Les spécialistes comprennent les besoins des utilisateurs et les utilisateurs peuvent se faire expliquer quelques basiques d’Internet par des spécialistes. C’est pragmatique et on sent que les personnes qui agissent sont des personnes qui pratiquent le web.

Cela dit, Les PME françaises sur Internet sont dynamiques. Internet dépasse les frontières. Ce qui n’est pas disponible en France, on va tout simplement le chercher ailleurs.

3. Enfin quels outils ou sites « coup de cœur » conseillerez-vous à une PME qui se crée pour qu’elle fasse du buzz à moindre coût ?

Faire du buzz…c’est mythique. Les gens pensent qu’avec un site internet, ils vont avoir une visibilité immédiate. Or un site web est avant tout un média avec du contenu qu’il faut promouvoir. Le buzz devient de plus en plus technique et à moins d’avoir un produit génial, il ne faut pas croire aux miracles. Bien sûr il y a quelques exceptions : des personnes qui sont devenues des stars d’Internet suite à une vidéo, mais cela reste rare. D’abord il faut comprendre qu’il n’y a pas d’outils ou de sites qui permettent de faire du buzz si on n’a pas de contenu à proposer. Ensuite, il existe différents moyens de promouvoir son contenu :

Il y a d’abord le buzz très bas de gamme des blogueurs. La technique est simple : on copie sur son blog les derniers scoops ou posts concernant les people ou les infos « insolites » trouvés sur d’autres blogs . On relaye l’information sur des Digg-Like et on demande à ses copains (son réseau) via des outils comme Twitter de voter pour ses contributions. Cette technique permet de faire du trafic et de vendre des pubs Adwords mais je ne la conseille pas, surtout dans un contexte professionnel. Contenu bas de gamme = visite bas de gamme.

Les grosses entreprises font appel à des agences spécialisées pour développer des jeux en flash ou des vidéos. Le contenu fait souvent appel aux références geeks (Star Wars, Pac Man, et compagnie). Les geeks relayent l’information sur leurs blogs, forums etc. et le buzz démarre. Le film Bienvenue chez les ch’tis a fait par exemple appel à une agence, Supergazol, pour faire son buzz. Ces agences recrutent des Community Manager dont le rôle est de créer et d’animer des communautés autour d’un produit, de publier des contenus (commentaires sur les forums et les blog, posts sur des Digg-likes, relais sur des réseaux sociaux, etc.). Il s’agit là de véritable campagne de publicité… mais sur le web.

Pour les petites PME, les budgets requis ne sont pas abordables. Si on veut faire du buzz soi même, le premier point est de s’intéresser à Internet et de comprendre comment ça marche. Je rencontre beaucoup de gens dont le cahier des charges pour leur site web se limite à des aspects graphiques. Ces gens limitent leur utilisation d’Internet à l’achat de billets de trains et à des recherches basiques sur Google. Et ils veulent faire du buzz, être numéro un sur les moteurs, sans jamais se poser la question du contenu qu’ils veulent offrir à leurs clients. Un peu comme si un commerçant imaginait la vitrine de son magasin, sans se poser la question de ce qu’il va mettre dans ses rayons. Ensuite il faut trouver les sites relais et les communautés dans sa cible. Si le contenu d’un site de designer est par exemple repris dans Yanko Design, LE magazine web dédié au Design, c’est le début de la gloire. Si on est musicien, une présence sur MySpace est obligatoire, si on est photographe il faut mettre ses photos sur Flickr, etc. Alimenter son site et ceux de sa communauté est un bon moyen pour acquérir une notoriété ciblée.

28 octobre 2008

Mathilde Bohrmann, est co-fondatrice d’UGAL, solutions de CMS pour PME. Elle a participé à la création de plusieurs sites web, dont surcouf.com, et était précédemment Directrice Marketing et R&D chez LaCie.

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