1. Côté datacenters, les acteurs sont surtout américains. Y a-t-il une place pour des acteurs français avec un stockage sur notre sol et le cas échéant avec une différenciation sur l’offre ?
Le marché des datacenters et des fournisseurs de cloud est en effet dominé aujourd’hui par les très gros acteurs nord-américains, comme AWS, Microsoft Azure, et Google, dont la part de marché mondiale cumulée est estimée à près de 60 %. Mais le reste du marché est assez fragmenté et occupé par des acteurs avec des profils assez divers, à une échelle plus régionale voire nationale, entre spécialistes de la colocation (comme Interxion ou Equinix), acteurs de l’hébergement (comme OVH), opérateurs télécoms historiques ou encore des entreprises de services numériques. Et quand on regarde le marché du cloud, sa taille et sa croissance (près de 150 milliards de dollars par an avec une croissance annuelle supérieure à 20 %), il est évident qu’il y a de la place pour permettre le développement d’autres acteurs. Surtout si ces acteurs ont des propositions de valeur différentes, la capacité de répondre de manière plus flexible et personnalisée aux attentes de différents types de clients, et encore plus s’ils sont porteurs de solutions nouvelles aux défis traditionnels du secteur.
Mais par-dessus tout, il y a un intérêt d’ordre stratégique des clients à confier leurs données à un fournisseur français ou européen pour se prémunir contre les risques liés à certaines réglementations internationales. Je pense notamment aux lois américaines comme le CLOUD Act et le Patriot Act. Elles exposent les organisations confiant leurs données à des fournisseurs américains au risque de voir ces données collectées par les autorités américaines dans le cadre d’une enquête judiciaire ou dans celui d’une enquête autour d’actes de terrorisme. Le vrai enjeu n’est pas la localisation physique des serveurs, en France ou en Europe, mais bien la nationalité de l’entreprise qui héberge les données et qui en a le contrôle. Au-delà du cadre strict des enquêtes, des questions se posent régulièrement sur les possibles pratiques malveillantes de certaines organisations américaines et le risque d’espionnage industriel qui en découle. Plusieurs scandales ont d’ailleurs déjà éclaté un peu partout dans le monde à ce sujet. Ces règles pourraient ainsi être détournées et servir de backdoors pour des opérations d’espionnage industriel et de concurrence déloyale. C’est tout l’enjeu du débat actuel en France autour du cloud souverain et du cloud de confiance. L’enjeu porte sur les données sensibles de nos administrations, de nos entreprises y-compris sur les secteurs les plus critiques comme celui de la Défense ou de l’énergie, mais également sur les données personnelles des Français, qu’il s’agisse notamment de santé ou d’éducation. L’actualité internationale nous rappelle malheureusement durement que la souveraineté est un sujet plus que jamais d’actualité et trop longtemps sous-estimé ou pris pour acquis.
2. Quelle opportunité de différenciation en matière de service et de prix par rapport à ces gros acteurs américains ? Pourriez-vous préciser les atouts de votre offre, comparativement par exemple à AWS, OVH ou 3DS Outscale par exemple ?
Nous sommes absolument convaincus que la proposition de valeur de Titan DataCenter est unique et que notre offre a des atouts différenciants par rapport à l’ensemble des offres actuelles sur le marché. Les premiers retours sont d’ailleurs très positifs : nous avons déjà près de 1 000 clients avant même l’ouverture de notre premier datacenter en France.
Pour revenir à la question précédente, Titan DC offre des solutions de cloud souverain, 100 % conçues, gérées et hébergées en France. Techniquement ensuite, notre design haute-densité et nos solutions garantissent à nos clients un très haut niveau de performance et de disponibilité. Notre conception est en cours de certification Tier-IV par l’Uptime Institute avec une disponibilité de 99,995 % (4 datacenters seulement en France disposent de ce très haut niveau de certification, parmi les quelques 200 en service). Nos datacenters délivrent ainsi une puissance réelle de 11,5 kW par mètre carré, très au-delà de la moyenne du marché (inférieure à 4 kW par m²). L’expertise IT de nos équipes nous permet de développer et programmer en interne l’ensemble des codes entrant dans la composition des équipements (switchs, serveurs…) et de développer notre propre solution optimisée de DCSO (Data Center Service Optimization).
En créant Titan DataCenter, nous avions en outre à cœur d’apporter des réponses concrètes aux défis traditionnels de l’industrie, notamment sur les aspects environnementaux. Nous avons ainsi développé des technologies pour réduire notre empreinte environnementale. Grâce à des réseaux de chaleur entre nos datacenters et les quartiers environnants (particuliers, services publics et de santé…), nous valorisons de fait la chaleur fatale émise par les équipements. À la clé, une production d’eau chaude et de chauffage à prix très réduit pour la communauté, et des économies substantielles d’énergie pour le refroidissement du datacenter pour Titan.
Grâce à des algorithmes d’intelligence artificielle nous répartissons au cours de la journée et des saisons les flux en fonction de la température de l’eau et des profils de consommation des différents profils d’utilisateurs. Le PUE (indicateur d’efficacité énergétique) de nos installations se situe entre 1,18 et 1,12, alors que la moyenne du secteur est de 1,80. Nous mettons également en œuvre des leviers d’action sur les autres dimensions de responsabilité sociale et environnementale, qu’il s’agisse de formation des jeunes talents, de contribution à notre environnement économique local proche, ou encore de réduction de notre consommation en eau.
Enfin, notre dernier point de différenciation concerne le service et le support apportés à nos clients. Le support technique est effectué par des techniciens ingénieurs français. Le service au client et sa satisfaction sont au cœur de notre action. En tant qu’anciens utilisateurs de fournisseurs de cloud et de datacenters, c’est même l’un des points de frustration qui ont été à l’origine de l’aventure Titan !
3. Vous avez un premier data center à Mougins avec une maîtrise des couches basses et des partenariats avec de nombreux acteurs du numérique tout en conservant la maîtrise technique.
Est-ce que Titan DC est un peu à l’image de Free qui avait bousculé le secteur des télécoms avec sa triple box mais du côté des data centers ?
Enfin, comment vous vous positionnez par rapport au risque géopolitique (hausse du coût de l’énergie avec la guerre en Ukraine, pénurie de semi-conducteurs avec le risque lié à Taïwan vis-à-vis de la Chine) ?
La comparaison est flatteuse, avec Free qui a véritablement fait bouger les lignes de l’industrie des opérateurs télécoms ! Mais elle est assez bien vue en effet, à plusieurs titres.
Du point de vue technique d’abord, et de la maîtrise totale de bout en bout de la conception et de l’intégration des différentes briques du modèle Titan DataCenter : interconnexion au réseau de fibre haut débit par un réseau propriétaire, conception par le bureau d’études interne Titan Ingénierie du bâtiment de dernière génération et des dispositifs de valorisation de l’énergie fatale dégagée par les serveurs, co-développement des équipements des racks et serveurs via nos partenariats R&D avec des partenaires de premier plan, programmation en interne des ASICs des switchs et des éléments de réseau, et enfin développement en interne du DCOS qui permet le pilotage et l’optimisation globale des serveurs et des flux de données.
Mais le parallèle vaut également par le positionnement « performance / prix » de l’offre de Titan DataCenter pour les clients. Notre offre 100 % modulable permet tout d’abord au client de personnaliser le produit en fonction de son besoin, en matière de stockage, de compute, de services (RPA)… Et ensuite, le modèle haute densité de la technologie et de l’offre Titan DataCenter garantit au client qu’il pourra dans les faits réellement bénéficier de la puissance qu’il a achetée ou installée (colocation). Je le rappelle, nos serveurs sont en cours de certification à 11,5 kWa par m² par l’Uptime Institute, soit plus du double du marché !
Il est certain que les risques voire les tendances fortes que vous évoquez ne font que conforter le bien fondé du modèle de Titan DataCenter, qu’il s’agisse de notre modèle technologique à haute densité qui permet de tirer le maximum de potentiel des équipements (et donc des composants rares), ou encore de notre modèle vertueux en matière de consommation énergétique, qui est un modèle triplement gagnant : pour nos clients, pour la communauté environnant nos data centers, et pour Titan !
Vincent Pobelle est Directeur des opérations de Titan Datacenter. Avec 20 ans d’expérience dans la transformation des organisations, leur développement et l’amélioration de leur performance et des expériences dans le conseil et l’industrie dans des contextes internationaux dans des postes opérationnels et de direction dans un grand groupe industriel présent à l’international, il est à présent directeur des opérations de Titan DC
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