1. Pourriez-nous vous relater comment vous avez vécu les révolutions tunisiennes et comment vous avez relayé l’évènement sur votre blog Tunisian Girl et les réseaux sociaux ? Quels étaient vos objectifs initiaux en alertant l’opinion publique ?
Quand j’ai appris que Mohamed Bouazizi s’est immolé par le feu, j’ai été très choquée et j’ai commencé à chercher l’information concernant ce qui s’est passé en contactant mon réseau d’amis virtuels ainsi qu’à travers des avocats ( des amis) et je la partageais sur Facebook et Twitter .Deux jours après l’horrible accident j’ai écrit un premier billet sur mon blog intitulé Sidi Bouzid brûle. Puis j’ai commencé à participer aux manifestations organisées à Tunis ( la capitale en soutien aux habitants de Sidi Bouzid) , je prenais des photos et des vidéos que je mettais en ligne et je passais en direct sur différentes chaînes télé de news internationales pour reporter ce qui se passait avant de décider de partir sur place début janvier. Et c’est là que j’ai pris des photos de manifestations et de martyrs . Mon objectif c’est celui que j’ai toujours eu sous le régime de Ben Ali bien avant le début des événements : montrer la réalité des choses en brisant un blackout médiatique imposé par le régime à travers le monopole sur les médias et la censure. Et puis je voulais donner une voix à ceux qui n’en avaient pas. Je savais depuis des années que les choses allaient très mal en Tunisie et je rêvais d’un changement… Quand tout a commencé j’ai agis spontanément .. Je bloguais depuis des années, je participais à des campagnes en ligne depuis des années…
2. Comment jugez-vous l’asymétrie d’usage d’Internet entre les élites et la jeune population ? En quoi Internet fait-il peur aux dirigeants dans les pays dictatoriaux ?
Avant les événements rares étaient les jeunes qui utilisaient Internet pour l’activisme. Je voyais des jeunes chater, partager des vidéos de sports , musiques, gags et loisirs. D’ailleurs les profils Facebook et Twitter des rares jeunes qui osaient critiquer le régime tunisien étaient censurés. Mais pendant les événements tout le monde s’est mis à l’activisme. Après le départ de Ben Ali, certains partis politiques qui ont saisi l’importance et la force d’Internet (surtout les partis au pouvoir) ont recruté des jeunes qui travaillent sur les réseaux sociaux pour discréditer les cyber-activistes qui continuent à critiquer la situation, les dissidents , les opposants politiques etc. De nos jours tout le monde se définit comme blogueur même s’il n’a pas de blog et même s’il n’arrive pas à écrire une phrase correcte et même si tout ce qu’il fait c’est de propager des rumeurs en utilisant des photos manipulées en utilisant Photoshop…. Facebook devient répugnant avec tous les mensonges et les rumeurs qu’on y trouve.
3. Enfin, pourriez-vous nous présenter votre livre Blogueuse pour un printemps arabe ?
C’est le fruit d’une rencontre avec Stéphane Hessel. Ses éditeurs(Indigène) m’ont contactée pour me demander si je voulais écrire un petit ouvrage dans la même collection (ceux qui marchent contre le vent) où Stéphane Hessel a publié Indignez-vous et je n ‘ai pas hésité à le faire. Le livre relate ma petite expérience de cyber-activiste et blogueuse en Tunisie. C’est un petit résumé d’une petite expérience qui n’en est qu’à ses débuts. Ce livre ou opuscule n’est qu’un début pour moi, j’ai toujours rêver d’écrire des livres.
5 décembre 2012
Lina Ben Mhenni est Blogueuse depuis 2007 et a écrit un petit livre Tunisian Girl : Blogueuse pour un Printemps arabe. Elle a été nominée pour le Prix Nobel de la Paix en 2011 et a reçu différents prix en Europe dont le Prix de Rome pour la Paix et l’action Humanitaire, le Prix Premio Minerva, le Prix Sean Mac Bride pour la Paix.
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