Les AdWords, la vache à lait de Google qui permet la croissance tous azimuts
Plus de 90 % des revenus de Google sont réalisés avec les AdWords/AdSense grâce au principe de vente aux enchères des mots clés. Le principe, lors d’une requête faite avec le moteur de recherche Google, consiste à afficher dans la zone d’annonces les résultats des partenaires pour contribuer à leur visibilité. En échange, dès qu’un internaute clique sur le lien, le partenaire verse une somme de quelques dizaines de centimes à Google. Néanmoins, Google poursuit sa croissance tentaculaire : rachats d’entreprises innovantes en série, développement d’une kyrielle de services gratuits. Toutefois, insidieusement, Google dont la profitabilité tourne autour de 25 % est en train de faire évoluer sa politique commerciale en faisant payer certains de ses services.
De plus en plus de services Google payants pour l’heure pour les grands comptes
La suite bureautique Google Apps permettait à sa création de créer gratuitement 200 comptes utilisateurs. La gratuité a d’abord été restreinte à 50 puis désormais à 10 comptes. Google Analytics propose une version payante pour les grandes entreprises qui souhaitent disposer de statistiques sur les visiteurs de leur site. La différence réside dans le volume plus conséquent des données traitées et l’existence d’un support technique. Le dernier en date et le plus emblématique à basculer dans le mode facturé est Google Maps. L’accès aux API de Google Maps est payant dès que le volume quotidien de requêtes dépasse une certaine quantité, 25 000 pour l’heure. Toute tranche de 1 000 accès supplémentaire sera facturée entre 4 et 8 dollars. Mais ce seuil peut évoluer à tout moment à l’image des conditions générales d’utilisation d’un réseau social tel que Facebook, Ning qui est devenu payant le 1er juillet 2010 ou encore Twitter. Tout service qui se base sur Google Maps pour sa propre solution logicielle devra débourser une redevance au-delà de ce seuil pour pouvoir utiliser ce service. Ceci va affecter les mashups développés autour de Google Maps. Si leur business model est basé sur la gratuité du service encapsulé, la pérennité de celui-ci peut être remise en cause. Il en est de même pour Google Translate qui à compter du 1er décembre sera payant pour les très gros consommateurs. Le motif invoqué est la lutte contre le spam. On peut se poser la question à plus long terme d’un Gmail ou d’un Google + payant même si pour ce dernier ce n’est pas d’actualité, la priorité étant le rattrapage de Facebook et Twitter.
Google est-il l’opium du peuple ?
Créant un phénomène d’accoutumance ou d’addiction auprès des internautes qui ont adopté le service gratuitement, puis réalisant progressivement un quasi-monopole de fait en phagocytant ses concurrents, la voie est alors ouverte pour les faire payer progressivement à partir d’une date plus lointaine. Les internautes sont-ils prisonniers ou peuvent-ils basculer facilement vers un autre service, telle est la question sachant que la question centrale est à la fois celle des données publiées via une application Google (par ex. YouTube, Gmail, Google Docs) mais aussi celle des mashups réalisés via des applications Google.
Concrètement les usages des outils Google sont guidés par ceux de la vie privée et à l’heure où les frontières vie professionnelle/vie privée s’étiolent, on peut penser que les utilisateurs étant habitués à utiliser à titre personnel et de surcroît gratuitement les outils Google sont enclins à les souhaiter dans le contexte de l’entreprise. La pression pour les utiliser dans la sphère professionnelle est réelle.
Google Maps payant est une alerte amenant à reconsidérer ses développements de mashups !
La gratuité ou la vente des services peut être justifié selon les cas mais en tout état de cause, le développement de mashups autour de solutions gratuites est à méditer (en particulier les services de géolocalisation autour de Google Maps). Il peut être possible de s’appuyer dans un premier temps sur une solution sur étagère pour aller vite dans la commercialisation d’un service. Puis dans un second temps, afin de se dévulnérabiliser, envisager de développer la « boîte noire » sur laquelle votre solution s’appuie. L’avantage est double, maîtrise du code pour être rassuré par rapport par exemple à des failles de sécurité et maîtrise de sa maintenance. Mais aussi moindre fragilité économique par rapport à un maillon de la solution qui du jour au lendemain deviendrait facturé et pourrait remettre en cause le modèle économique de votre outil sur le Web dans le cas des services générant des micro-revenus.
[Chronique rédigée pour JOLpress]
2 Commentaires
@Sébastien
Très vrai. On assiste à un inexorable passable au freemium, avec un continuum entre la version gratuite, basique et de plus en plus bridée, et la version premium. La première étape pour une large partie des acteurs du Web est la course à l’audience. La deuxième, la monétisation des services.
Pour Seesmic, c’est en revanche une modification du positionnement du projet. Initialement, il s’agissait d’un réseau social tourné vers la vidéo. Il arrivait un peu en avance par rapport aux besoins des internautes lors de son lancement. Puis LLM a recentré par rapport à Twitter.
Captifs plutôt que prisonniers. Pour les entreprises qui ont l’assise financière suffisante pour pouvoir attendre et installer par la gratuité un nouveau service qu’elles vendront par la suite, la stratégie devient habituelle. Elles créent le besoin et/ou le markettent au mieux. Elles facilitent l’adoption par une barrière de coût qui est basse ou nulle. Elles profitent aussi de l’appétit et de l’habitude au changement dans les nouvelles technologies. Quand le produit est suffisamment utilisé et que sa notoriété est forte, il passe en payant. Quand des versions gratuites subsistent, elles deviennent bridées. Dans la musique, par exemple, Spotify ou Deezer font de même, revenant largement sur leurs idéaux et valeurs de départ.
A propos de la liberté sur l’utilisation des API, c’est la même chose. Dans un premier temps les nouveaux entrants laissent une grande liberté afin d’accélérer leur notoriété et trouver, ou améliorer, leur modèle économique par des tiers à moindre frais, comme Twitter par exemple. Puis, une fois les développements intéressants identifiés, le bridage intervient et le service original exploite les pistes. De mémoire, Seesmic a modifié son objet et son modèle économique pour éviter cette dépendance trop risquée. Le bridage de Twitter sur son API , toujours plus drastique, pose problème aux entreprises qui utilisent le réseau pour les LiveTweets par exemple. Un service payant ne m’étonnerait pas dans l’avenir.