1. Pourriez-vous revenir sur les étapes majeures de votre parcours en matière de télécom, depuis Microsoft, Skype jusqu’à la création de la licorne Symphony qui a un positionnement différent de Slack et désormais avec Hive ? Quel est le fil directeur qui vous anime ?
J’ai rejoint Microsoft en 1999, où j’ai fondé et dirigé l’unité commerciale Real Time Communication de Microsoft, en étroite collaboration avec Bill Gates et Steve Ballmer. Chez Microsoft, j’ai eu la chance de superviser le développement des produits de collaboration de l’entreprise, notamment NetMeeting, Windows Messenger, Exchange IM, Exchange Conferencing Server et Live Communications Server.
Après avoir passé 7 ans chez Thomson Reuters, j’ai ensuite été directeur général et vice-président de Skype for Business en janvier 2010, qui a été racheté par Microsoft en 2011. Viennent ensuite mes activités entrepreneuriales propres : j’ai fondé en août 2012 Perzo, une plateforme de messagerie mobile et web qui chiffre chaque message. J’ai vendu Perzo en 2013 et fondé en 2014 Symphony, désormais licorne qui offre une plateforme de flux de travail collaboratif sécurisée et conforme pour les institutions de la finance.
Symphony offre des solutions intégrées permettant de standardiser, automatiser et optimiser les flux de communication des services financiers. En effet, les marchés financiers nécessitent la traçabilité de tous les échanges (écrits, données, voix, vidéo, partage d’écran), un chiffrement sûr de point à point, l’intégration avec les systèmes d’information, l’automatisation des processus homme-machine et machine-machine assistés par l’intelligence artificielle. Symphony se différencie par rapport aux outils de collaboration tels que Slack ou Teams par l’anticipation des besoins de l’industrie financière, notamment en terme de compliance.
Et pour finir, nous avons célébré voici quelques jours les un an de la création de Hive (hivenet.com), ma nouvelle start-up, un cloud pair-à-pair, souverain et écologique. Hive fédère et combine les ressources inutilisées des ordinateurs (et bien sûr des smartphones) du réseau. L’ambition étant de proposer une alternative décentralisée et une solution qui ne soit pas un me too product des autres offres cloud en ayant cette différenciation tant d’un point de vue écologique que de souveraineté avec des données stockées à proximité dans le edge et non aux Etats-Unis où la législation peut être problématique pour les Européens par exemple. On démarre ainsi avec le far edge, les terminaux avec une construction qui émane des utilisateurs et de leur matériel (hiveNet), le réseau sur lequel tourne notre application hiveDisk pour le stockage sécurisé des fichiers.
Je suis animé par toutes les aventures entrepreneuriales qui améliorent l’humanité et la condition humaine tout en garantissant les droits humains numériques.
2. Hive est présenté comme disruptif par rapport aux acteurs du cloud (AWS, Azure, Google Cloud et les autres) en étant communautaire et s’appuyant sur les capacités matérielles des internautes, souverain pour le stockage des données en redonnant le contrôle avec une décentralisation par rapport aux plateformes. Pourriez-vous nous en dire plus sur hiveNet, hiveDisk et les développements prévus de votre nouveau challenge avec Antoine Clerget ? Pourquoi distinguer le stockage du calcul est clé dans le dispositif ? Comment le lancement va être orchestré ?
Hive est ravi d’étendre son service au grand public. La proposition unique de Hive d’offrir un réseau décentralisé et responsable a trouvé un écho auprès d’un large public, permettant à l’entreprise de construire une communauté solide d’environ 1000 utilisateurs répartis dans plus de 50 pays. HiveDisk n’en est qu’à ses premiers pas pour devenir la solution de stockage cloud pour ceux qui accordent de l’importance à la sécurité, à la durabilité et à la décentralisation.
De nombreuses étapes challengeantes nous attendent encore. Au cours des douze derniers mois, les évolutions ont été significatives, en particulier avec le premier produit, hiveDisk.
Depuis sa création en juin 2022, des avancées majeures et des améliorations constantes nous ont conduits vers une version preview en octobre 2022 et cet été vers un produit accessible à tous.
Nous allons continuer à améliorer hiveDisk, travailler sur un modèle B2B en 2024 et continuer à déposer des brevets. Nous en avons 4 en cours pour l’heure. Nous aimerions également lancer une nouvelle levée de fonds, visant au moins 20 millions d’euros d’ici la fin de l’année pour poursuivre notre montée en charge et ajouter hiveCompute, l’exécution des programmes, dans notre répertoire.
Dans le but d’atteindre 10 000 utilisateurs d’ici à la fin de 2023, nous lancerons en effet et comme annoncé en conférence de presse une campagne notamment sur les réseaux sociaux utilisés par nos utilisateurs : Discord, Telegram, Reddit et Twitter. L’équipe marketing se rapproche d’influenceurs pour présenter hiveDisk au plus grand nombre.
3. Comme beaucoup d’entreprises du numérique qui réussissent, Hive est présent à Cannes, Genève, Hong Kong et Dubaï. Est-ce que la dimension mondiale du projet s’impose naturellement ? Enfin votre offre de cloud multiOS peut être qualifiée de « datacenterless ». Est-ce qu’elle correspond à revenir à l’esprit d’Internet à ses débuts, d’égal à égal avec un effet de moindre consommation d’énergie bénéfique pour la planète ?
En effet, à l’origine, Internet a été conçu dans un contexte de guerre froide et de nécessaire résilience pour décentraliser les données pour finalement évoluer vers un autre modèle dans lequel les données sont stockées et traitées sur un serveur centralisé avec l’avènement des plateformes et des GAFAM en particulier. Cela perd de son efficacité en termes d’économie d’énergie et en termes de sécurité des données, ce qui est préjudiciable pour les internautes eux-mêmes.
Quant à la dimension internationale, nous avons fait le choix dès le début de se déployer dans plusieurs pays. Plusieurs raisons ont motivé ce choix. Trouver les meilleurs talents, ingénieurs et créateurs. Bénéficier des meilleures structures publiques de protection des données et de financement de l’innovation. Miser sur la mixité pour une synergie productive. Pour créer un cloud à la hauteur des enjeux planétaires, il est indispensable d’adopter cette dimension globale dans notre essence même.
En France, nous avons installé Hive à la Bastide Rouge à Cannes. Connaissant bien la ville pour y avoir étudié, s’installer à Cannes était une évidence pour tout l’écosystème de l’innovation qui s’y développe, d’autant que j’ai déjà installé le secteur recherche et développement de ma société Symphony du côté de Sophia Antipolis.
Hive possède maintenant des bureaux à Cannes, Genève, Hong Kong et Dubaï.
Nous avons une équipe qui travaille de partout dans le monde, de toute l’Europe, les États-Unis, l’Inde… S’implanter dans chaque pays est une richesse, assure une proximité avec les souverainetés locales et permet de pratiquer la même philosophie dans notre culture que nos produits, l’exécution décentralisée et distribuée.
David Gurlé est entrepreneur et ingénieur français, reconnu comme l’un des pionniers des communications sur IP. Il est le fondateur de la licorne Symphony Communication Service et a créé en 2022 la start-up Hive, qui vient bouleverser le marché du cloud.
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