La réflexion et la comparaison entre le monde physique avec maisons et appartements d’un côté et le monde numérique avec sites, blogs et réseaux sociaux de l’autre sont loin d’être anodines. Il existe des similitudes frappantes entre la vraie vie et Internet.
Avoir un site web ou un blog hébergé, c’est comme vivre respectivement dans une maison ou dans un appartement. A contrario disposer de comptes sur les réseaux sociaux est analogue à vivre à l’hôtel. Pourquoi une telle comparaison entre le monde Internet et celui de l’habitation dans le monde physique ? Considérons quatre critères principaux (économique, risques, marketing, confort et évolution).
L’habitation physique ou virtuelle au niveau économique
Pour une maison, on l’achète, souvent à crédit. On paye ensuite la taxe foncière (et parfois d’habitation, l’IFI, etc.). On peut aussi la louer.
Pour un site, on le développe ou on le fait développer. On peut le développer soi-même et maîtriser le HMTL ou avoir recours à des templates comme il existe des modèles de maison (pavillons Phénix, maison Pierre ou recours à un architecte pour du sur-mesure). On paye ensuite l’hébergement.
Pour un hôtel, on le loue et on a en sus la taxe de séjour et parfois des suppléments.
Pour les réseaux sociaux, on les utilise de base gratuitement. Et pour être davantage visible et/ou avoir moins de publicité ou encore des services additionnels, on paye des formules Premium.
Comme pour une maison, le coût de développement du site est plus important que la présence initiale sur un réseau social, très rapide, où il suffit de réserver un nom et de remplir différents champs, choisir une image ou un logo, rajouter une description, etc.
L’énergie de la maison ou de l’appartement est payée par l’occupant qu’il soit propriétaire ou locataire. A l’hôtel, c’est compris dans la nuitée globale. Pour un site ou un blog ou sur les réseaux sociaux, ce sont les données que l’on produit et qui peuvent être ensuite aspirées par les moteurs de recherche et les IA génératives pour respectivement donner des réponses à des requêtes et à des prompts. Dans le cas des réseaux sociaux, contre la gratuité d’utilisation dans la formule de base, vos données personnelles sont exploitées par les réseaux sociaux. Dans le cas d’un site, le contenu est souvent plus riche en moyenne car les articles plus détaillés que les posts.
La facturation se fait pour un site avec des formules qui reviennent à des tranches de Mo ou Go stockés dans un cas, au m2 dans l’autre et selon le lieu.
Pour acquérir de l’audience, il est plus simple pour les réseaux sociaux avec les campagnes marketing ciblées alors que pour un site, qui obéit à la fois à du référencement naturel et du référencement payant, l’opération est plus complexe. La maîtrise du SEO est impérative pour un site et en particulier être visible de Google. De surcroît les liens externes publiés sur les réseaux sociaux qui renvoient à un site sont pénalisés. De la même façon, l’hôtel fait de la publicité pour lui-même ou des hôtels de sa chaîne dans le cas d’un groupe hôtelier et non pour des concurrents.
Des risques pour un site ou pour les réseaux sociaux comme pour l’hébergement physique
Sur Internet, un site peut être attaqué (attaque par déni de service, malware, etc.). C’est un peu à l’image de cambriolages ou de vandalisme. Il convient de respecter le droit positif, RGPD, etc. alors que pour les réseaux sociaux la responsabilité incombe à la plateforme avec une cybersurveillance à la fois humaine et algorithmique. Pour un blog hébergé sur une plateforme comme Typepad, Blogger, les attaques existent aussi mais l’hébergeur joue le rôle du syndic alors que pour un site vous vous défendez vous-même ou à l’aide de solutions de sécurité ou d’assurance, etc. Avec les réseaux sociaux, vous pouvez être déplateformisé et banni du réseau social considéré, du jour au lendemain pour mauvais comportement (diffusion de contenu haineux, etc.). C’est un peu si comme l’hôtelier vous mettez à la porte parce que vous avez fait du bruit ou commis d’autres incivilités.
Un autre risque est la dépendance de la présence sur les réseaux sociaux aux changements des algorithmes et des effets comme d’être shadowbané et beaucoup moins visibles des socionautes. Sur un réseau social, on ne maîtrise pas les commentaires comme pour les avis laissés à propos d’un hôtel alors que pour un site, de la modération a priori ou a posteriori est possible permettant un contenu de qualité.
Le marketing reste partout essentiel
Vous avez une moindre sécurité sur un réseau social mais la facilité de développer une communauté de suiveurs. Sur un site, c’est plus la logique du temps long. Pour le référencement, l’ancienneté d’un site joue en votre faveur comme dans l’immobilier où le bon ancien (haussmannien ou art déco par exemple) est favorisé par rapport au moderne des années 1970-1980 avec toutefois des exceptions.
Les réseaux sociaux permettent de s’appuyer plus facilement sur les influenceurs qui peuvent interagir directement avec une large audience.
Pour le site, vous êtes maître de votre marketing comme pour une maison ou un appartement où l’on a un sentiment d’appartenance. On a plus le contrôle sur la structuration et le contenu. En revanche pour les réseaux sociaux, on a plus d’interactivité et de dynamisme comme les allers et venues dans les hôtels où il faut refaire les chambres, etc. Cela correspond aux réponses aux commentaires déposés, etc. On peut aussi avoir un bad buzz comme lorsqu’un client est mécontent d’un hôtel. Du reste un client mécontent ou satisfait d’un hôtel peut s’exprimer sur les réseaux sociaux mais s’il laisse des avis sur des sites comme Tripadvisor, les commentaires auront plus d’impact dans le temps alors que la durée de vie sera plus éphémère sur les réseaux sociaux sauf si c’est repris ensuite par des sites et des médias traditionnels.
Au niveau du confort de vie
Les travaux dans une maison sont à faire vous-même comme pour un site, le changement de thème, de plug-in selon vos goûts. Les évolutions fonctionnelles et techniques sont faites par les réseaux sociaux comme par l’hôtel qui décide de refaire sa devanture, ses aménagements. Dans ce cas, vous ne les maîtrisez pas. Mais tel l’hébergement dans un hôtel, vous pouvez quitter un outil pour un autre dans un processus de migration numérique (Facebook vers Instagram par exemple) même si l’audience est plus complexe à faire suivre sauf si vous jouissez d’une grande notoriété.
Le site a une durée de vie plus de l’ordre du temps long même s’il existe des exceptions comme des sites temporaires pour le lancement d’un film, d’une campagne électorale, etc.
Où habiter finalement et tendances sociétales ?
La tendance dans la société est à la fluidité. La propriété devient moins courante et l’usage prime. Avec la récente loi Lagleize, on s’achemine (malheureusement) vers la propriété du bâti sans être propriétaire mais locataire du sol. Les 2 (foncier et bâti) sont dissociés, le but est de rendre l’accession à la propriété plus abordable même si sur le long terme le propriétaire « métayerisé » peut être perdant. C’est un peu du reste comme un site où le nom de domaine est loué chaque année et à renouveler auprès de l’hébergeur. L’idéal dans le monde numérique est d’être présent à la fois via un site et des réseaux sociaux, ce qui est un signe de maturité numérique plus importante. C’est à l’image de la personne qui habite dans une maison ou un appartement et peut partir en vacances à l’hôtel. Il reste le cas du camping non traité et qui serait un réseau social low cost.
On constate en outre de plus en plus de développement de formules d’hébergement de type Airbnb qui viennent ubériser les hôtels. La question reste de savoir qui viendra chambouler les réseaux sociaux.
1 Commentaire
Excellente métaphore David, c’est exactement ça. Nous dormons dans des hôtels et ce ne sont plus des auberges de jeunesse, mais plutôt des garnis un peu louches loués à l’heure.