1. Comment jugez-vous l’écosystème actuel des réseaux sociaux d’entreprise ? Quels sont les acteurs majeurs et comment peut-on pour un acteur comme Jamespot aborder le marché pas simple du B2B ?
Le marché des RSE (Réseaux Sociaux d’Entreprise) ne s’est jamais aussi bien porté ! Tous les acteurs ont des taux de croissances incroyables car la maturité est là. Au moment où on en parle le moins dans les médias…, c’est le moment en Europe où les organisations s’équipent.
En fait, on constate en B2B, donc pour les entreprises, des usages aujourd’hui qui émergent alors qu’ils sont déployés en B2C depuis pas mal de temps dans des outils bien connus comme Facebook, Messenger/WhatsApp ou encore Instagram. Pour donner un exemple, avec WhatsApp je peux communiquer rapidement avec mes amis et des groupes d’amis. Et avec Teams de Microsoft ou Jamespot, on peut communiquer et collaborer rapidement et en temps réel avec un collègue ou un groupe de collègues. Après, on remplacera souvent les photos échangées en B2C par des documents dans le B2B mais l’intention reste la même.
Si on regarde les acteurs, on n’est pas surpris de voir comme depuis toujours dans notre secteurs les dominant GAFAM, Microsoft & Google en tête suivi de Facebook de proposer une solution. Ils emportent avec eux toute la puissance de leur marque et surtout, comme c’est le cas avec Teams de Microsoft aujourd’hui, le gros des troupes déjà équipés de Microsoft Office et à qui gratuitement on fait découvrir les bienfaits du collaboratif. Aussi, pour Jamespot c’est un marché à double tranchant : d’un côté, on est totalement écartés de certaines compétitions car la marque prime sans même de compétition, de comparaison. Mais d’un autre côté cela évangélise des milliers d’entreprises au sujet, ce qui peut rejaillir ensuite sur la recherche de solution plus adaptée à leurs besoins. L’un dans l’autre en mode « Bootstrap » on dépasse les 30/40 % de croissance chaque année. Il y a de la place pour une belle croissance !
2. Quelles sont avec Jamespot votre positionnement et vos éléments de différenciation ? Que pensez-vous des analyses faites par des cabinets comme Lecko qui analyse les offres comme celle que vous proposez ? Un acteur français comme vous peut-il/doit-il passer à l’échelle et comment ?
Notre différenciation dans le marché est centrée sur trois valeurs clés. D’abord s’adapter au contexte du client et non l’inverse. Chaque client qui déploie Jamespot a son Digital Workplace à son image, sa culture, son jargon. Et cette adaptation est obtenue sans développement. On rend aux métiers leur autonomie. Là où Microsoft ou Google Suite est le même partout. C’est un choix fort souvent imposé par les DSI. Et nous croyions que les entreprises qui s’empareront de leur avenir digital seront celles qui se démarqueront et sur-performeront. Les autres seront des suiveurs. Deuxième point, nous sommes 100 % européens, hébergés en France, de droit français. C’est notre différentiel pour les acteurs européens dont on connaît le risque et la dépendance aux États-Unis. Enfin, on propose un catalogue très large d’applications et d’usages dans la plateforme. Ceci assure une montée en charge et une progression dans les usages collaboratifs à long terme avec Jamespot. Cela va même jusqu’au co-développement produit en co-innovation. On construit donc un écosystème de plateforme avec nos clients.
Pour répondre à votre deuxième question, sur les analystes, ils sont souvent mandatés pour travailler avec les grands clients eux-mêmes attirés par les gros, comme Microsoft aujourd’hui. Aussi, même si – quand on lit les études Lecko – on a pas mal d’atouts à défendre, la question principale auxquelles ils répondent est la suivante : j’ai mis en place Office 365… comment faire pour que ça marche ? Que l’usage prenne ? Ils sont eux aussi victimes de cette attente basique de modernisation notamment du CAC40 qui n’est pas une transformation.
Il n’en reste pas moins que le marché étant très vaste. À notre mesure on passe l’échelle étape par étape. Par exemple, cette année pour Jamespot c’est le basculement vers la mise en place de très grands réseaux (plus de 100 000 utilisateurs). On travaille depuis plus d’un an aux impacts en terme d’infrastructure mais aussi de fonctionnel. D’autre part, suite à des ventes réussies à l’international, on attaque de manière proactive ce marché à l’international avec des forces dédiées au marché européen (Italie, Espagne, Pays-Bas). Dans un deuxième temps, après la dimension européenne, se posera la question des marchés américain et asiatique. Chacun est très différent, et nécessite de très gros moyens pour réussir. On le voit avec les méga levées des « pré-licornes ». C’est en effet une obligation dans notre secteur que de franchir ces paliers. Reste à définir le rythme : effréné avec des levées de fonds, modéré en Bootstrap. Mais dans les deux cas, c’est la même trajectoire de croissance. Le logiciel supporte mal le statu quo.
3. Enfin comment les réseaux sociaux d’entreprise peuvent participer à la transformation digitale des entreprises et plus largement des organisations ? Quel accompagnement humain et culturel effectuer en complément aux outils pour que la transformation digitale réussisse ?
La transformation digitale est à la fois une posture, une culture et des outils, services, digitaux mis en place. Sur le premier volet, celui humain, le RSE a un rôle central de propagation des pratiques, d’onboarding des équipes, de motivation continue, etc. Le RSE est le levier de la transformation digitale en tant que système qui relie et montre à tous ce qui se passe. C’est d’autant plus vrai que souvent le « digital » crée les conditions de rendre des actes plus invisibles qu’ils ne l’étaient auparavant.
Et comme ce sont des changements rapides, il faut accompagner chacun dans l’entreprise à la réussite de cette transformation digitale. Rappeler sans cesse le « Why », la question du sens qui est primordiale. Montrer des exemples, concrets. Faire des ateliers en action, etc. Que ce soit en interne par la culture ou en faisant appel à des consultants externes qui ont la dimension de ce passage.
C’est un moment incroyable de changement de nos sociétés qu’on est en train de vivre à travers nos outils. Le passage à une collaboration à très large échelle. Je pense par exemple aux plateformes de crowdfunding qui permettent à certains de concrétiser leurs projets financés dans le monde entier. Ou encore les meetup & échanges au local d’acteurs qui se regroupent autour de passions, d’engagement politiques. Ce qui s’est cristallisé autour de l’écologie et d’une Greta Thunberg en est une illustration frappante. L’humanité se retrouve pour la première fois tout entière à se parler, travailler ensemble. C’est parfois violent, terrifiant mais aussi exaltant pour imaginer le futur et le vivre.
28 janvier 2020
Alain Garnier, P-DG de Jamespot est serial entrepreneur. Il a fondé Arisem, revendu à Thalès, puis Evalimage et Jamespot en 2005. Il anime entre autre le blog et les Friday Lives où il déchiffre l’actualité du monde digital.
Commentaires récents