Les technologies sont ce que nous en faisons et des usages insoupçonnés peuvent naître
Comme je le soulignais dans Géopolitique d’Internet – Qui gouverne le monde ?, on vit une transition : passage de la détention d’un bien à celui de l’usage, comme en témoignent la location d’un bien que l’on utilise peu souvent (par exemple perceuse), le co-voiturage, le Velib’, etc. Avec toutefois un bémol s’agissant des outils de connexion, certains comme la tablette peuvent se prêter alors que le smartphone reste personnel à la fois dans son usage (paiement depuis celui-ci, selfies) et à un degré moindre dans sa personnalisation (coques de protection, sonnerie, fond d’écran) et pour certains un prolongement de soi. Le smartphone vient en outre comme une seconde peau qu’il est important de renouveler fréquemment pour disposer de nouvelles micro-fonctions. Apple cultive l’art de susciter l’envie tout en assurant l’obsolescence programmée de sa flotte.
Et de nouveaux usages découlent des nouveaux outils, notamment le smartphone et la tablette qui changent les comportements et s’utilisent comme des « couteaux suisse du web » :
- – réflexe de télécharger une App pour se faciliter la vie avec un comportement plus zapping chez les jeunes générations (où l’on fait le ménage des App peu utilisées alors que les plus âgées ont plutôt tendance à les conserver)
- – prendre une photo avec son smartphone d’une étiquette en magasin et zoomer – ce qui introduit une fonction loupe de facto – pour voir les ingrédients du produit alimentaire (présence d’huile de palme, etc.) mais depuis lors est apparu l’App YuKa qui automatise cette tâche
- – prendre en photo un article d’un journal, typiquement 20 Minutes ou Metro avant de le déposer pour qu’un autre passager dans les transports en commun prenne le relais avec éventuellement envoi dans sa messagerie pour une impression ultérieure
- – prendre une vidéo en concert ou enregistrer une musique (une conférence ou un cours) avec son smartphone même si on a une déperdition de la qualité
- – se servir de son smartphone comme d’une lampe de poche. C’est d’ailleurs ce qui est arrivé collectivement et récemment à des spectateurs d’un match de football après une panne de courant dans le stade
- – utiliser comme boussole, navigation (Google Maps ou Waze), réveil, chronomètre, miroir pour se coiffer ou se maquiller, etc.
- – exploiter les outils de géolocalisation comme l’App Zenly pour se rencontrer aux abords d’un stade, lieu de concert, autre en groupe ou à deux
- – badger, conserver ses coupons de paiement
- – et de plus en plus pour payer sans contact (NFC)
Et l’on pourrait multiplier les exemples de ce genre.
Les générations face aux nouvelles technologies
Les générations Y et Z sont motrices quant aux nouveaux usages et c’est plutôt parmi elles que l’on trouve les primo adoptants. Et souvent pour bêta-tester de nouveaux produits et services ou même des concepts, certains services innovation des grandes entreprises se tournent vers elles.
Parfois même la génération X et celle d’avant (les boomers) font un tout autre usage des nouveaux outils. On avait le lecteur de CD d’un PC qui pouvait servir en entreprise à un vulgaire repose gobelet (sic). Dans cette vidéo humoristique on voit un homme qui nous montre les limites d’une tablette… On devrait toujours lire la notice avant utilisation même si de plus en plus le mode d’emploi est compris dans le produit lui-même (Apple, Ikéa). Laissez une tablette ou un smartphone à un enfant de moins de 2 ans et faites le test pour savoir comment il va s’en servir. On sera loin de la poule qui trouve un couteau.
Une réflexion quant à la réalité des nouveaux usages sous un angle sociologique figure sur le site La revue des médias de l’INA.
Explosion des usages possibles et droits à garder à l’esprit
La tendance est à l’explosion combinatoire des possibilités du fait de la multiplication des techniques : big data, cloud, open data, géolocalisation, réalité virtuelle, Internet des objets et multiplication des supports de connexion à Internet… avec l’intelligence artificielle qui a à présent des applications intéressantes, élémentaire mon cher Watson.
En outre certains usages sont conditionnés par la culture et peuvent venir par exemple de Chine, de Corée du Sud ou du Japon avant d’atteindre l’Occident et les GAFA en particulier. Ainsi le chinois WeChat a été pionnier dans le développement de fonction de streaming en direct (avant Periscope puis Facebook Live) et de paiement sur mobile avec AliPay (Apple, Android et Samsung ont à présent tous leur système). Le Japon, pays des mangas, a été addict aux émojis avant nous et est en avance en matière d’usage de la réalité virtuelle et des robots.
Dans ce contexte, il est important que chacun réinvente ses propres frontières numériques :
– Droit à la déconnexion en se ménageant des plages de consultation de ses messages sur les réseaux sociaux, sa messagerie et accorder des priorités. Qui aurait parié qu’avec le déclin des pagers (les Tatoo, Tam Tam, Kobby – qui s’en souvient ?) et l’arrivée des téléphones portables, les SMS, moins intrusifs, seraient revenus en force ?
– Droit à l’oubli avec une juste pression citoyenne pour ne pas tomber dans une société Big Brother même si les données sont souvent massivement fournies par les internautes qui souhaitent plus tard les supprimer en totalité ou en partie
– Droit au silence des puces pour que les puces RFID, l’Internet des objets et tous les capteurs n’enregistrent pas tout en permanence un peu à l’image du mode géolocalisation qui peut être activé ou non.
L’éternelle question reste « mais comment faisions-nous avant sans … ? » (« … » peut être smartphone, Facebook, Instagram, Snap ou tout nouvel outil ou nouvelle application).
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